Calligraphie "Dieu n'impose à toute âme que sa capacité" (Coran)
Le voyage sans retour
Comme la dissolution finale de notre monde, la mort individuelle est la fin d’un monde et un jugement, c’est-à-dire une absorption de l’extérieur par l’intérieur.
Puisque « tout périt sauf la face de Dieu », tout existence est transitoire ; cette impermanence est représentée par différents états qui sont autant d’étapes d’un voyage.
« Vous irez certainement d’étape en étape » (Coran 84, 19)
Tous nos états doivent converger vers ce point unique, Principe de tout ce qui existe et hors duquel il n’y a rien :
« Tous doivent nous faire retour »
Il faut assumer les conséquences de notre état présent qui est l’état humain. L’éventualité de n’avoir pas réalisé le sens divin de la condition humaine est bien évidemment redoutable. Issue tragique et infernale puisqu'on ne pourrait prétendre alors à une vie de Lumière ; il faudrait affronter le feu qui en est la condition à rebours, afin que la matière ignée, cette part combustible qui s’oppose à la nature angélique et solaire, soit consumée (Coran CIV, 7). Tout provient de la Miséricorde divine.
Trois états de trouvent dévoilés à notre entendement humain, trois états décrits dans la première sourate du Coran :
- celui des Bienheureux : les gratifiés. Ce sont ceux dont le cœur est tourné vers l’intérieur (Intériorisation, conversion, concentration, élévation)
- celui des errants
- celui des Malheureux : les réprouvés dont le cœur est tourné à l’envers (extériorisation, inversion, dispersion , abaissement).
« Une muraille sera dressée entre eux, ayant une porte à l’intérieur de laquelle est la Miséricorde, tandis qu’à l’extérieur, en face, sera le Tourment. » (LVII, 13 et XCI, 190)
Le Prophète (saws) a dit : « l’homme dort, quand il meurt, il se réveille ».
Il perçoit soudain l’universalité incommensurable des Mondes et prend conscience de ce qui est ontologiquement et non plus dans le prisme déformant des illusions terrestres. « Le vertige de la mort restitue le Vrai…» (Coran L, 19).
Le jugement est donc lucidité, clairvoyance : « L’homme sera clairvoyance envers lui-même » (Coran LXXV, 14 - L, 22 – L, 19).
L’homme se condamne, ses membres même l’accusent (Coran XXIV, 24).
Celui qui accepte d’être guidé l’est pour lui-même (linafsihi) et celui qui reste ignorant l’est sur lui-même (‘àlà nafsihi). Dire que Dieu punit et récompense, c’est prendre conscience de notre responsabilité -dans la mesure assignée : « Dieu n’impose à toute âme que sa capacité » (Coran)-
et des conséquences que cela implique : c’est assumer. Il est tout aussi vrai de parler de colère, de vengeance divine. Tout déséquilibre appelle un choc en retour. Ce que nous accomplissons à l’encontre du divin –illusoirement- agit contre nous.(Coran XXVII, 4)
Etats paradisiaques comme états infernaux sont des perpétuités, éternels à notre point de vue puisque le temps y est aboli. (III, 23-24). L’au delà coranique a donc la qualité de durée illimitée (abad, abaden) et d’immortalité (khuld) et non d’Eternité (azal) confirmé par la sunna : « Lorsque les bienheureux entreront au Paradis et les réprouvés en Enfer, Dieu dira : « S’il en est parmi eux qui aient dans le cœur le poids d’un grain de moutarde de foi, qu’on les fasse sortir. » Ils sortiront alors tout brûlés et carbonisés ; on les jettera dans le fleuve de la vie et ils renaîtront alors comme pousse la graine de pourpier dans le limon du torrent » (Hadith 81-51, 12 de El-Bokhâri